St Jacques de Compostelle
Carte
du parcours.
Nous sommes 6 à nous élancer sur les sentiers du pèlerinage
de St Jacques de Compostelle. A la joyeuse troupe de l’année
dernière (la descente de la Loire par les sentiers, du Mont Gerbier
de Jonc à la Baule) à savoir Franck, Jean Paul, Olivier
et le narrateur, sont venus s’ajouter l’inénarrable Jean-Claude
qui a déjà sévit lors de notre excursion dans l’Atlas
deux ans plus tôt, et Franck (un deuxième) qui fait là
sont premier raid VTT.
Samedi 4 aout: Le Puy – Saint Alban sur Limagnole
82 kilomètres, 5h50
La traversée de Lyon au petit matin, déguisé en
VTTiste, parmi les noctambules a comme toujours un petit coté
décalé. Les retrouvailles avec les cinq autres compères
ont lieux à la gare de Lyon vers 5 heures du matin. Nous devons
prendre un train poussif en direction du Puy-en-Velay afin de débuter
le raid de la cathédrale, point de départ traditionnel
du chemin de Saint Jacques.
Nous chargeons les vélos dans le compartiment " spécial
vélos " du train et tentons de finir la nuit vautrés
sur les banquettes du train désert, bercé par le doux
son du moteur diesel.
Après 2h30 de voyage, nous arrivons au Puy en Velay, non sans
être passés par Vorey de sinistre mémoire pour les
acteurs du raid sur la Loire de l’année passée (notre
première étape, la plus moche).

Au puy, le " vrai " départ de la route du
pèlerinage commence au pied de la cathédrale. Soucieux
de nous conformer à la tradition, nous grimpons vers la cathédrale
qui domine la ville. Après avoir pas mal tourné dans les
ruelles, nous trouvons finalement notre point de départ :
la cathédrale et son escalier vertigineux. Traditionnelle photo
de départ grâce au concours d’un brave monsieur qui passait
par là, alors qu’à à peine 8 heures le coin est
encore désert.
Histoire de se donner du courage, pause café / pâtisseries
au Puy, puis nous voici partis, direction St Jean Pied de Port, au pied
des Pyrénées et à quelques centaines de kilomètres
de là.
L’entrée en matière du chemin de St Jacques est plutôt
cruelle : il s’agit d’une grosse bosse sur la route pour sortir
du Puy (qui géologiquement parlant, se situe dans un trou, pas
seulement géologiquement parlant d’ailleurs). Nous dépassons
et saluons nos premiers pèlerins marcheurs avant d’entamer les
premiers chemins. Ceux ci sont relativement caillouteux, rendant la
progression assez lente malgré le peu de dénivelé.
Un bon point, la pluie de la veille qui nous a causé quelques
inquiétudes quand aux conditions du raid, n’a pas trop laissé
de traces.
Jean Claude inaugure la première crevaison, photo pour immortaliser
ce premier incident, il y en aura sans doute d’autres. Le chemin est
assez " ondulant " : jamais parfaitement plat,
le temps n’est pas encore au grand beau, mais il doit faire dans les
20-25°C et la tendance semble conduire vers une amélioration.
Toujours dans le chapitre " inauguration ", c’est
Jean Paul qui se prend la première boite : Suite à
un mauvais choix d’ornière, l’équipage (Jean Paul et son
vélo) s’emballe dans une pente abrupte, l’apprenti pilote tente
une manoeuvre aussi brutale que désespérée en abandonnant
sa monture en route. Fou rire dans l’assistance car aucuns dommage collatéraux
ne sont à déplorer.
Pour cause de carence de goûter de 10h, nous pique-niquons vers
midi, après 22 kilomètres couverts (sur 74 prévus).
Il est décidé de faire un peu de route histoire d’avancer
un peu (refrain connu).
Nous passons alors une interminable bosse sur la route, que les deux
Francks, très en forme, escaladent tambour battant, les autres
se contentant de suivre plus laborieusement.
Après avoir redescendu ce que nous avions eut tant de mal à
grimper, nous tournons un bon moment dans Saugues pour trouver par où
ressort le GR. La suite du chemin est toujours assez rugueuse, c’est
à dire jamais plate! Les moins en forme, dont je fais malheureusement
partie, commencent à trouver le temps long, cette année
je n’ai pas été parfaitement assidu et le manque de kilomètres
au compteur se fait cruellement sentir.

Nous continuons tant bien que mal, les plus costauds attendant les
moins affûtés. Heureusement, Franck B. a des soucis avec
son frein (à disque) avant, qui le contraint à de nombreux
arrêts pour réglages, cela permet aux retardataires de
"se refaire". Dans la dernière bosse du jour, un groupe
de randonneurs à pieds manquent de me dépasser, heureusement
pour moi, la fin du parcours est descendante. A la ferme des Sauvages
et la Chapelle St Roc, nous croisons le chemin que nous avions empruntés
3 ans plus tôt avec Lionel et Olivier, lors de notre " Clermont-Ferrand
Montpellier ".
Arrivés à St Alban, nous dévastons les rayons
de la boulangerie locale avant de trouver notre hôtel. Cette première
journée est de l’avis de tous, et pas seulement des moins entraînés
une bonne mise en jambes. Demain cela risque d’être un peu plus
dur.
Notre hôtel nous offre un confort rustique. Nous n‘échappons
heureusement pas au plat local : l’aligot, à base de
purée de pommes de terre et de Tome, un délice reconstituant!
Nuit agité pour Jean Claude qui, en quête d’un peu plus
de confort, entreprend de visiter l’hôtel en pleine nuit, dérangeant
au passage nos malheureux voisins d’étage.
Dimanche 4 aout: Saint Alban - Saint Caulme d’Olt
83 kilomètres, 5h30
Départ un peu tardif vers 9h30 de St Alban : Nous ne sommes
pas encore parfaitement rodés et nous perdons du temps à
faire les courses, vérifier / réparer les vélos
qui le nécessite. Joli bricolage sur les disques de Franck B. :
Un maillon de chaîne fait office de cale pour une plaquette de
frein avant.
Au programme du jour : nous restons sur le plateau du massif central
toute la journée, puis dégringolons sur la vallée
pour dormir à St Caulme. Le relief n’est pas parfaitement plat
pour autant, ça monte et descend constamment, en termes cycliste,
on appelle ça un relief rugueux.
Il fait un beau soleil, mais comme nous nous trouvons à environ
1000-1200 mètres, nous ne souffrons pas de la chaleur, nous prenons
cependant au passage de belles couleurs, petites mises à jour
de bronzage cycliste pour les moins assidus. Nous trouvons quelques
stigmates de la tempête de l’hiver 1999 avec quelques cadavres
d’arbres arrachés ça et là, mais heureusement,
le GR est parfaitement praticable.
En ce beau dimanche, beaucoup de promeneurs sur les chemins se mêlent
aux ‘vrais’ pèlerins. Heureusement tous sont relativement sympathiques
et compréhensifs quand nous les doublons dans des passages étroits.
Nous trouvons un spot à Pique-nique parfait : un champ
idéalement orienté au sud, particulièrement propice
à la sieste au soleil et au séchage de cuissard suite
à la lessive de la veille.

Nous continuons notre progression sur le plateau et sous le soleil.
JC profite d’une halte fontaine pour oublier un de ses bidons, comme
il s’en apercevra 10 kilomètres plus loin, il en fait son deuil.
Nous doublons un procession de jeunes catholiques (intégristes ?)
avec croix, chants au milieu de nulle part sur le GR.
Le bled suivant est paralysé par une course cycliste sur route,
nous assistons au passage du premier tour et continuons notre route.
La suite du sentier devient moins roulante : Nous progressons
lentement dans des alpages où il faut ouvrir / fermer de nombreuses
barrières et ou il n’est pas aisé de pédaler, d’autant
plus que nous ne sommes pas encore réhabitués à
rouler avec un sac sur le dos.
Nous arrivons finalement à Aubrac qui marque la fin du plateau
du massif central. Le temps de remplir les bidons, nous nous élançons
dans une très longue descente sur la vallée : plus
de milles mètres de dénivelés négatifs d’un
seul coup. Longue, bonne, sinueuse et caillouteuse sont les qualificatifs
qui se prêtent le mieux à cette descente, ombragée
également, et c’est tant mieux, car le soleil cogne fort :
Alors que nous perdons de l’altitude, nous retrouvons des températures
très estivales.
Les deux Francks et Jean Claude sont d’humeur badine, et Franck D paye
son tribu aux lois de la gravitation universelle dans la toute dernière
portion descendante, un beau vol plané parait-il, sans trop de
mal heureusement.
Nous arrivons sur St Caulme : un joli village non loin de la vallée
du Lot. Grâce à ce beau soleil dominical, nous avons tous
pris de fort jolies couleurs, à la limite du coup de soleil pour
certains.

Nous logeons à nouveau dans un hôtel, à peine arrivés,
nous avons à sacrifier au rituel de la douche et surtout de la
lessive, pour ce faire, nous squattons les minuscules lavabos des chambres,
histoire de faire tremper nos affaires de la journée. Les chambres
sont ensuite rapidement " décorées "
de cuissards, maillots, chaussettes, accrochés partout où
cela est possible dans les chambres, afin de profiter de la chaleur
ambiante pour ne pas avoir à fermer les sacs avec des affaires
mouillées demain matin.
Repas laborieux : Nous avons fait l’erreur de dîner à
l’hôtel, nous quémandons un malheureux plat de pattes que
nous attendons plus d’une heure, un peu radins les tauliers.
Lundi 6 aout: St Caulme d’Olt - Livinhac le Haut
100 kilomètres 4h25
Après une nuit bercée par le bruit des moteurs à
pots percés des " jacky voitures " et scooters
de la jeunesse locale (merci les bouchons d’oreille), au matin, nous
découvrons avec effroi que la région est humectée
par un crachin breton.
Petit déjeuner passé à mendier / voler du pain
et vue d’une journée longue et fraîche. Au moment de partir,
Olivier constate que son moyeu arrière n’a pas survécut
à la descente cassante d’hier : Il ne s’agit pas d’un petit
jeu comme nous le pensions au départ, le corps du moyeu lui-même
est fendu en deux… Impossible d’envisager de continuer une semaine sur
des chemins dans ces conditions.
Nous réunissons le comité de crise, il nous faut trouver
un vélociste pour changer le moyeu, ou carrément la roue.
Nous échafaudons toutes sortes de plans, ce faire envoyer une
roue à une étape, rechercher un magasin ouvert (pas facile
un lundi). Les pages jaunes consultées à la poste de St
Caulme nous apprennent qu’Espalion, le village voisin abrite deux bouclards :
Nous tentons notre chance et faisons route (4 kilomètres) vers
le village.
Gros coup de bol, alors que nous tournons autour d’un des deux magasins
fermé, le tenancier des lieux passe par là et accepte
d’ouvrir pour tenter une réparation : Il dispose d’un moyeu
certes un peu fatigué, mais encore opérationnel dans ses
fonds de tiroirs, et se propose de faire l’échange. Sans trop
d’autre alternative, Olivier accepte, et nous mettons à profit
cette pause d’une heure pour faire quelques cartes postales et donner
quelques coups de fil dans un bar voisin.
Vers 11 heures, nous pouvons enfin nous mettre en route, la transplantation
a eut lieux avec succès. Vu notre retard, nous feront pas mal
de route. Dans un premier temps, nous suivons la vallée du Lot,
malheureusement toujours sous la pluie.
Rouler en vélo sur la route et sous la pluie est toujours un
cruel dilemme : Soit vous roulez à 10cm de la roue arrière
de celui qui vous précède, afin de profiter de l’effet
magique de l’aspiration que connaissent bien les routiers, mais cette
même roue arrière vous asperge d’eau sale ramassée
par terre ; soit chacun roule à 5 mètre d’intervalle,
accomplissant chacun une sorte de contre la montre individuel.
Bien que pas trop d’humeur à apprécier les atours de
la région, nous apprécions la traversée du joli
village d’Estaing, puis d’Entraigue, où nous quittons la vallée
du Lot pour une très longue bosse, toujours sur la route et toujours
sous une bruine persistante. Au sommet (après une bonne heure
de manivelles humides) nous pique-niquons dans l’église de Golhimac
du fait de la carence du bar local, qui, lassé de voir tous ces
pèlerins humides, a précipitamment fermé boutique.
Au moment de partir, la pluie cesse, nous aurons simplement froid dans
la première descente, mais nous ne nous retremperons pas.

Toujours sur la route, nous traversons une petite vallée (descente
puis remontée) pour finalement plonger sur Conques, joli village
médiéval, envahi de touristes malheureusement. Nous quittons
alors précipitamment le bled, Olivier nous promet une montée
mémorable en quittant le village : Nous sommes censés
devoir sortir de cette vallée pour cause d’absence de route ou
chemin. Il n’en est rien, une petite route suit le cours de la rivière,
petite route en faux plat descendant de surcroît. Cette dernière
partie de route est donc rondement menée, même si les participations
un rien trop vigoureuses de Franck B viennent semer un peu de désorganisation
dans notre mécanisme de relais.
Nous arrivons donc rapidement à Décazeville, triste ville
industrielle délabrée au bord du Lot ; fort heureusement,
notre étape se trouve dans une petite vallée parallèle.
Dernière bosse pour changer de vallée, encore et toujours
par la route, et au milieu des voitures, puis pause Coca sur la place
de la mairie de Livinhac. Le simplet du village, attiré par nos
vélos garés sur la place, semble tout particulièrement
apprécier celui de Franck D, notre roi des sprints à la
pancarte.
Notre étape est une fort jolie chambre d’hôte dans laquelle
nous sommes très gentiment accueillis par la famille Roberston
à l’heure du Thé auquel nous sommes conviés. Premières
conversation de plus de 3 mots avec des pèlerins marcheurs pour
qui notre étape de la veille représente 3 voire 4 jours
de marche.
Jean Claude, négocie avec succès auprès de la
maîtresse de maison le lavage / séchage de nos affaire
à la machine, le bonheur est simple pendant un raid.
Pour le repas du soir, nous nous séparons d’Olivier qui dîne
à la table de nos hôtes, avec discussions théologico-intellectuelles
à la clef. Le reste de la troupe s’impose à une table
de teutons auprès desquels nous passons pour de parfaits goujats
en dévorant systématiquement tous les plats avant qu’ils
n’arrivent à eux.
Mardi 07 aout: Livinhac le Haut - Limogne en Quercy
85 kilomètres
Nous quittons le gîte à une heure décente : 9 heures.
Tous les marcheurs sont partis depuis au moins une heure, mais nous
les auront rattrapés en moins d’une heure normalement. Le temps
est brumeux, c’est plutôt bon signe pour la journée (pas
de pluie à craindre comme hier). Histoire de s’échauffer,
nous shuntons la première bosse et passons par la route, nous
récupérons ensuite rapidement le GR. Celui-ci se présente
sous forme d’une route étroite qui monte et descend constamment,
au grès des petites vallées qui ponctuent la région.
Comme prévu, nous rattrapons nos voisins de gîte de la
veille dans la première heure.
Le soleil fait rapidement son apparition, le GR toujours sur de petites
routes et chemins, toujours relativement rugueux (nécessité
de passer le moyen, voire le petit plateau dans les bosses. Pause courses
/ Coca / pâtisseries à Figeac, au bord du Lot. La reprise
nous rappelle à une dure réalité géologique :
pour quitter une vallée, il faut généralement grimper,
et nous escaladons une interminable bosse sous un cagnard déjà
bien installé en cette fin de matinée. A partir de maintenant
nous nous sentons définitivement dans le Sud.

La suite des festivités de la matinée se compose d’un
chemin blanc et caillouteux sur un plateau en plein cagnard, agrémenté
de quelques " coups de cul " assez raides.
Après la pause pique-nique / sieste, la première bosse
est comme toujours un calvaire. Nous descendons sur Carjac par un petit
chemin étroit et a flanc de colline. Là, nous commettons
une erreur en faisant une pause Coca alors que la route est loin d’être
terminée pour la journée. L’enthousiasme n’est pas de
mise devant la bonne quinzaine de kilomètres qu’il nous reste,
d’autant qu’une bonne partie est composé d’une grosse bosse sur
un chemin caillouteux est assez ensoleillé. Ce dernier tronçon
est d’ailleurs passablement cassant car très caillouteux, il
est difficile d’avancer assis sur la selle avec un vélo rigide,
et pédaler constamment en danseuse est assez usant quand on a
un sac à dos de 5 à 7 kilos sur le dos. Jean Claude lui
est satisfait de son tout suspendu et de sa selle " pullman ".
Le jeu du jour : le top bourricot. Les deux Francks et Jean Claude
(avec nettement moins de succès pour ce dernier) se disputent
systématiquement toutes les arrivées dans les villages,
les pancartes d’entrée des bleds constituant autant de lignes
d’arrivée de course. A foncer la tète dans le guidon,
ils loupent pas mal de bifurcations de GR, et si généralement,
Olivier les remet rapidement dans le droit chemin, nous finissons par
nous retrouver à deux sur le GR, les 4 autres étant perdus
dans la pampa (sans doute une panne de cerveau pour Jean Paul qui participait
exceptionnellement à une bourre), mais finalement, les 4 bourricots
nous rejoignent tous penauds.

Notre gîte du soir est assez confortable, il faut par contre
trouver promptement où se sustenter, nous nous rabattons sur
le seul restaurant du bled, par flemme de faire à manger. Dans
la soirée, le ciel semble tourner au vinaigre, soyons fataliste,
on verra demain.